Pour ne pas disparaître
Nous sommes souvent frappés par la cohérence qui se dégage de l’ensemble des textes reçus. Lorsqu’on s’y attarde, on trouve toujours un dénominateur commun. Cette année, il nous est apparu nettement : la disparition. Elle se lisait partout, obsédante. Sans cesse renouvelée, elle se métamorphosait pour retrouver sa forme la plus pure quelques textes plus loin. Lorsqu’elle n’était pas clairement nommée, elle menaçait : le monde se décomposait, la nature s’émoussait, les corps s’évaporaient.
Et on ne peut s’étonner que la disparition habite l’imaginaire collectif. Elle est inévitable. Tous les mois, de nouveaux visages disparus défilent sur nos réseaux sociaux. Ils s’ajoutent aux photos horribles de communautés entières abandonnées à leur misère ou invisibilisées. Chaque semaine une langue meurt avec son dernier locuteur. Au cours des 30 dernières années, plus de la moitié des espèces répertoriées ont disparu. On assiste à une montée du DIY et du survivalisme derrière lesquels on entrevoit la menace d’un effondrement du collectif. Notre emballement pour le documentaire témoigne de notre besoin de s’informer et de s’outiller autrement qu’en passant par les médias de masse. Nous cherchons des modèles et des sorties de secours. Nous avons envie d’expériences citoyennes, de vrai, nous voulons retrouver la confiance que nous avons déjà eue en l’autre et en demain.
Et le grand tremblement lucide que nous traversons, celui que cette vague déferlante d’informations provoque en nous, est terrible. Cette lumière soudaine sur l’état du monde crée dans la population une colère légitime, et laisse les jeunes générations avec une sensation d’urgence difficile à gérer. Ce que nous appelons l’écoanxiété, c’est ce sentiment que la responsabilité nous incombe maintenant de renverser la vapeur.
Ce que nous vivons, c’est la fin de notre adolescence. Nous ne sommes plus invulnérables. Nous ne sommes plus invincibles. Finie l’insouciance, fini notre enthousiasme devant les multiples visages du progrès. On n’applaudit plus la sortie du nouveau iPhone 11 quand on sait que tous ses prédécesseurs sont désormais caducs. Qu’ils s’amassent maintenant dans les dompes du monde, bien concrets. Qu’ils ajoutent quelques mètres aux décharges déjà débordantes de l’Inde ou des Philippines.
Nous avons 15, 20, 30 ans, et nous sommes hantés par la disparition.
Aujourd’hui, les adolescents demandent le menu végétarien. Ils exigent un contrôle des armes à feu. Ils militent pour obtenir une éducation libérée du capitalisme. Ils demandent à l’ONU de veiller à la protection de nos réserves d’eau potable. Ils se réunissent devant les parlements du monde pour préserver la terre et affirmer qu’ils ont, eux aussi, droit à un avenir.
Ils ont 12, 15, 17 ans, et sont déjà des adultes. Mais des adultes révoltés. Des adultes qui n’ont pas abandonné. Les adultes qu’ils souhaiteraient avoir pour modèles. Et c’est dans ce grand ressac que nous puisons maintenant notre espoir. Parce que ces adultes qui remettent à l’ordre leurs parents, ces adultes prématurés encore pleins d’impulsions et d’indignation, bien qu’ils dérangent nos habitudes et s’imposent là où nous devrions décider, nous les regardons avec fierté. Nous les trouvons brillants, beaux et courageux.
Et c’est aussi ce que m’inspirent les textes de cette édition. Chacun, à sa façon, fait valoir ce qui dans l’humain est à protéger. Ce qui le rend bouleversant, ce qui fait de lui un être à la fois tragique et sublime.
Et rappelons, pour finir, ce qu’on a dit cent fois et qui pourtant ne devient pas banal : ce que nous faisons aujourd’hui, c’est aussi pour ne pas disparaître.
Gratuit
TU PENSAIS QUE C’TAIT ÇA QUE C’TAIT MAIS C’TAIS PAS ÇA QUE C’TAIT
Fenêtre ouverte sur la classe de maître à la Maison de la littérature
ÉTIENNE LEPAGE
et les dix participants
En ligne ou par courriel
https://www.theatreperiscope.
billetterie@theatreperiscope.qc.ca
Par téléphone
418-529-2183
Sur place
Théâtre Périscope
2 rue Crémazie, Québec
>> Carte
Lectures théâtrales : 15 $
Programme double (6 déc.) : 20 $
Lecture jeune public : 15 $
Soirée de clôture : 20 $ / 18 $ en prévente*
4 événements pour 50$
Les passeports «4 événements pour 50$» sont en vente uniquement par téléphone (quantité limitée).
* La prévente se termine le 27 novembre à 20 h.
Pour toute information sur le Jamais Lu, n’hésitez pas à nous contacter à info@jamaislu.com.